Les époux peuvent-ils choisir la loi applicable à leur divorce ? Sous quelle forme ?

Un nouveau règlement européen

Le règlement européen n°1259/2010 du Conseil du 20 décembre 2010 (dit Rome III), entré en vigueur au 30 décembre 2010 s’applique depuis le 21 juin 2012.
D’un point de vue géographique, le règlement n’est applicable que dans les Etats membres participant à la coopération renforcée, soit quatorze Etats (la Belgique, la Bulgarie, l’Allemagne, l’Espagne, la France, l’Italie, la Lettonie, le Luxembourg, la Hongrie, Malte, l’Autriche, le Portugal, la Roumanie et la Slovénie).
La règlement concerne tous les couples internationaux, quelle que soit leur résidence, ressortissants des 14 Etats membres participants ou des 13 autres Etats de l’UE ou d’un Etat tiers.
Le règlement Rome III remplace l’article 309 du Code civil. Il permet, si les époux sont d’accord, de choisir la loi applicable à leur divorce ou à leur séparation de corps. A défaut de choix par les parties, le règlement détermine la loi applicable.

Les lois susceptibles d’être choisies sont celles avec lesquelles ils ont des liens étroits en raison de leur résidence habituelle, de leur dernière résidence habituelle commune si l’un des époux y réside encore, de la nationalité de l’un des époux ou la loi du for. Cette loi peut être la loi d’un Etat membre non participant ou la loi d’un Etat non membre de l’Union européenne en raison du caractère universel du règlement.

Selon l’article 5, les lois susceptibles d’êtres choisies sont les suivantes :
la loi de l’Etat de la résidence habituelle des époux au moment de la conclusion de la convention; ou
la loi de la dernière résidence habituelle des époux pour autant que l’un d’eux y réside encore au moment de la conclusion de la convention; ou
la loi de l’Etat de la nationalité de l’un des époux au moment de la conclusion de la convention; ou
la loi du for.

La choix par les époux de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps indiqué à l’article 5, s’adresse à tous les couples internationaux, quelle que soit leur résidence, ressortissants des 14 Etats membres participants ou des 13 autres Etats de l’Union européenne ou d’un Etat tiers.

Indépendamment du tribunal saisit dans l’un des Etats membres participants, il sera appliqué la loi désignée d’un accord commun (sauf si la loi désignée est manifestement incompatible avec l’ordre public de cet Etat).

Cependant, si la juridiction saisie n’est pas celle d’un Etat membre participant au moment de l’instance en divorce ou en séparation de corps, cette convention ne sera peut-être pas reconnue par le juge devant lequel les époux plaideront. Il faudra vérifier si les règles de droit international privé en vigueur dans cet Etat ainsi que l’ordre public sont compatibles avec la loi désignée.

Il sera prudent, lorsque la convention de choix de loi applicable sera établie par les époux, de les avertir de sa limite possible d’admission au moment de la procédure de divorce ou de séparation de corps et de s’assurer, en cas de contentieux, que la loi désignée ne sera pas écartée par le juge compétent.

Les exigences de forme de la convention

La convention doit être formulée par écrit, datée et signée par les deux époux. Toute transmission par voie électronique qui permet de consigner durablement la convention est considérée comme revêtant une forme écrite.

Des règles formelles supplémentaires pour ce type de convention peuvent être prévues par la loi d’un Etat membre participant et ceci conduit aux distinctions suivantes (art 7) :
« Si, la loi de l’Etat membre participant dans lequel les deux époux ont leur résidence habituelle au moment de la conclusion de la convention prévoit des règles formelles supplémentaires pour ce type de convention, ces règlements s’appliquent.
« Si, au moment de la conclusion de la convention, les époux ont leur résidence habituelle dans des Etats membres participants différents et si les lois de ces Etats prévoient des règles formelles différentes, la convention est valable quand à la forme si elle satisfait aux conditions fixées par la loi de l’un de ces pays.
Si, au moment de la conclusion de la convention, seul l’un des époux a sa résidence habituelle dans un Etat membre participant et si cet Etat prévoit des règles formelles supplémentaires pour ce type de convention, ces règles s’appliquent ».

La loi applicable à défaut de choix par les parties

A défaut de choix de loi applicable, le règlement a instauré de règles de conflit de lois harmonieuses instaurant une échelle de critères de rattachements successifs reposant sur l’existence d’un lien étroit entre les époux et la loi concernée où la résidence habituelle figure en première place.

L’article 8 du règlement dispose que :
« A défaut de choix conformément à l’article 5, le divorce et la séparation de corps sont soumis à la loi de l’Etat :
de la résidence habituelle des époux au moment de la saisine de la juridiction ; ou à défaut,
de la dernière résidence habituelle des époux, pour autant que cette résidence n’ait pas pris fin plus d’un an avant la saisine de la juridiction et que l’un des époux réside encore dans cet Etat au moment de la saisine de la juridiction ; ou à défaut,
de la nationalité des deux époux au moment de la saisine de la juridiction ; ou, à défaut,
dont la juridiction est saisie. »

Selon l’article 10, la loi de la juridiction saisie s’appliquera « lorsque la loi applicable selon les articles 5 ou 8 ne prévoit pas le divorce ou lorsqu’elle n’accorde pas à l’un des époux, en raison se son appartenance, à l’un ou à l’autre sexe, une égalité d’accès au divorce ou à la séparation de corps ».

Seulement les causes de dissolution

Le règlement est limité également aux seules causes de dissolution (divorce par consentement mutuel ou autres) et à la séparation de corps. Les effets du divorce échappent en réalité dans une très large mesure à la loi du divorce et obéissent souvent à des dispositifs spéciaux. Citons, parmi les plus importants, la Convention de La Haye du 19 octobre 1996 pour la garde des enfants, ainsi que le règlement (CE) du 18 décembre 2008 et le protocole de La Haye du 23 novembre 2007 pour les obligations alimentaires.

Ainsi, les conséquences patrimoniales du divorce, à savoir la liquidation du régime matrimonial et la fixation de la prestation compensatoire (assimilée aux obligations alimentaires) sont exclues du champ d’application du règlement.

 

Miguel Morillon
Avocat au Barreau de Madrid

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